Les consommateurs de boissons Silk et Great Value devraient obtenir une «compensation financière significative», plaide un avocat de Montréal
Enceinte de 32 semaines, Émilie Michaud a dû prendre des antibiotiques après avoir consommé du lait d'amande Silk. La bactérie Listeria est particulièrement dangereuse pour les femmes enceintes et leurs bébés.
Les géants mondiaux derrière les boissons Silk et Great Value sont poursuivis au Québec pour la vente de produits contaminés. Leurs laits végétaux ont fait deux morts en Ontario la semaine dernière, lors d’une nouvelle épidémie de listériose.
Danone et Walmart, qui vendent respectivement la marque Silk et Great Value, sont accusés de négligence dans une demande de recours collectif déposée à la Cour supérieure, le 18 juillet, par le cabinet montréalais LPC Avocats.
«C’est honteux. Danone savait depuis un an que son lait était contaminé», se scandalise l’avocat Joey Zukran, qui exige que la multinationale française paye une «compensation financière significative» à ses nombreux clients québécois et canadiens.
Maple Leaf a craché 28 millions de dollars dans une cause similaire, en 2009, pour son rôle dans la crise de la listériose de 2008. Chacun des Canadiens contaminés par les viandes et charcuteries Maple Leaf a alors obtenu de 3000$ à 8000$.
La cause contre Danone et Walmart concerne tous les produits frappés par le rappel de Santé Canada du 8 juillet dernier. Le fédéral a alors interdit la consommation, la vente et la distribution de 18 laits végétaux à base de noix de cajou, d’amande, de noix de coco ou d’avoine.
photo tirée du site de LPC avocats
Quinze de ces boissons fort populaires sont de marque Silk et appartiennent à Danone, les trois autres à Walmart. Ils font l’objet d’un rappel en raison d’une possible contamination par la bactérie listeria monocytogenes.
«Danone a été négligente dans sa production. Ils doivent être tenus responsables de leurs actions, notamment la mort de deux personnes en Ontario», assène l’avocat Joey Zukran, qui a déposé sa poursuite au lendemain d’une annonce morbide.
LE RETOUR DU CAUCHEMAR
Le 17 juillet, Santé Canada a confirmé que deux personnes sont mortes en Ontario après avoir consommé des boissons Silk. Neuf autres personnes ont été hospitalisées après avoir bu une des boissons visées par le rappel.
Le Québec comptait, au 17 juillet, un cas de contamination par la bactérie Listeria, contre 10 cas en Ontario et un cas Nouvelle-Écosse. Les femmes enceintes et les personnes âgées sont particulièrement à risque.
Ça, Émilie Michaud ne le savait pas quand sa mère l’a appelée, le 8 juillet au matin, pour l’avertir du rappel de Santé Canada. Enceinte de 32 semaines, la résidante de Québec venait de connaître une semaine de malaises gastriques.
«J’ai ouvert le frigo. J’avais exactement le mauvais lait», se souvient la chimiste de formation. Intolérante au lactose, la femme de 33 ans consomme du lait végétal – «toujours celui en spécial» – depuis des années.
Comme c’était du Silk et qu’elle est à son 7e mois de grossesse, son médecin n’a pas pris de risque. Une batterie de tests plus tard, on lui a prescrit des antibiotiques pendant 10 jours.
- Écoutez l'entrevue avec Dr. Karl Weiss, microbiologiste et spécialiste en maladies infectieuses à l’Hôpital Juif de Montréal au micro de Pierre Nantel via QUB :
MÊME PAS REMBOURSÉS
Le Montréalais Luciano Todaro est dans le même bateau. Ce féru de lait d’amande – «j’en mets dans mes quatre cafés par jour» – a reçu un diagnostic de listériose, le 18 juin, avant de prendre des antibiotiques.
«J’avais des douleurs terribles au ventre», lance ce père d’un ado de 15 ans. Il a fallu qu’il voie les étagères de Silk vides chez Maxi pour apprendre que son produit favori était contaminé.
«Je n’ai jamais entendu parler du rappel», dénonce ce client déçu. En plus, dit-il, il est incapable d’obtenir un remboursement pour ses cartons de lait végétal contaminé.
«Le programme de rappel est passé sous le radar et le programme de compensation est totalement inadéquat», plaide Joey Zukran.
Christiane Rioux non plus n’arrive pas à se faire rembourser. La Montréalaise de «58 ans et trois quarts» traite son côlon irritable avec du lait végétal depuis cinq ans.
Non seulement Walmart refuse de lui rembourser ses achats, dit-elle, mais elle ne sait toujours pas si elle est infectée par la bactérie Listeria.
«J’ai des pertes d’appétit depuis un an. Je ne savais pas que j’étais peut-être malade», angoisse celle dont la prise de sang aura lieu le 2 août prochain.
Selon Santé Canada, les premières victimes canadiennes de Silk et de Great Value ont contracté la listeria en août 2023. Le rappel a eu lieu un an plus tard.
Tous les Québécois qui ont acheté les diverses boissons végétales réfrigérées de marque Silk et Great Value contaminées peuvent s’inscrire à l’action collective.